Faut-il avoir peur ?

Le 3 octobre dernier, le parlement européen votait plusieurs dispositions fixant le cap de la réduction des émissions de CO2 de l’industrie automobile à l’horizon 2025 / 2030. Les objectifs fixés ont, par la suite, été très légèrement revus à la baisse, lors de la négociation entre les différents ministres des états membres :

Comparés aux émissions CO2 de 2021, celles de 2025 devront baisser de 15% et celles de 2030 de 35% !

Avant son adoption définitive, le texte devra encore faire l’objet d’une négociation avec le parlement, ce qui ne pourra que concourir au durcissement des mesures annoncées.

Pour tenir ces objectifs, l’Europe fixe également aux constructeurs le chemin à suivre, en imposant un taux d’électrification des véhicules qui seront vendus à cet horizon : 20% en 2025 et 35% en 2030.

C’est sur un ton particulièrement grave et solennel, que la Direction a présenté ces directives européennes aux organisations syndicales. De nos échanges nous avons bien compris que pour la Direction :

  • Les constructeurs les plus faibles ne survivront pas.
  • Il est impossible de dire aujourd’hui à quoi ressembleront les entreprises automobiles en 2030.
  • Nous ne connaissons pas aujourd’hui l’impact des mesures annoncées sur l’emploi.
  • Et bien sûr, pour contrebalancer ces messages inquiétants : nous sommes confiants sur nos capacités et sur les opportunités que cela entrainera pour PSA.

Comment réagir syndicalement à ce type d’annonce ?

Même si la Direction s’en défend, il est clair qu’avec cette communication, et toutes celles qui nous arrivent depuis, PSA nous passe le message que, malgré les très bons résultats de ces derniers mois, ce n’est surtout pas l’heure de « relâcher nos efforts ». En substance : préparez-vous en 2019 à encore plus de réductions d’effectifs, plus de suppressions de postes, et toujours plus de modération salariale !

Pour la CFTC ce n’est pas acceptable en l’état.

Il est très vraisemblable que l’obligation d’électrifier massivement nos véhicules, et bien sûr de trouver des clients pour les acheter, va à l’avenir profondément changer le modèle économique des constructeurs et de toute la filière automobile. Mais à ce jour, l’absence de réponse de la Direction aux nombreuses questions posées, nous empêche, ne serait-ce que d’envisager, un énième plan d’austérité (rassurez-vous, dans le cas présent, nous hurlons avant d’avoir mal, rien ne nous a encore été annoncé. Nous sommes dans le préventif…)

Depuis la crise de 2007, tels des marathoniens de la performance (et non pas des « psychopathes de la performance »), nous enchainons les plans de restructuration, de transformation. Et c’est bien grâce aux efforts, consentis bon gré mal gré par chacun d’entre nous, que nous avons réussi, collectivement, à redresser notre entreprise et à dégager des marges de manœuvre importantes. Mais la Direction doit maintenant comprendre qu’il n’est pas possible d’enchainer marathon sur marathon.

 

Il faut laisser les équipes récupérer et les récompenser des efforts accomplis !

En attendant d’obtenir des réponses aux questions que nous nous posons, partons aujourd’hui du principe que, comme le laisse entendre la Direction, les défis devant nous sont immenses. Mais commençons aussi par rappeler que la position financière nette du Groupe a dépassé les 6 milliards d’euros en 2017, et qu’au vu des résultats de 2018, les moyens financiers de PSA devraient encore se consolider.

Alors de deux choses l’une :

  • Soit les projections à 5 ans sont alarmantes et/ou les investissements à réaliser dépassent nos moyens. Il est alors urgent d’avertir nos actionnaires que la promesse de leur verser 25% des bénéfices 2018 ne pourra pas être tenue en 2019.
  • Soit les défis sont immenses, mais nous avons les moyens d’y faire face. Il est alors urgent de récompenser les équipes, y compris financièrement, à la hauteur du chemin accompli et des résultats obtenus. Dans ces conditions, 2019 devrait être l’année de la réflexion, de l’élaboration et du partage d’une stratégie d’entreprise à même de répondre aux exigences d’électrification de nos productions. Et cela ne pourra pas se faire sans des équipes remotivées (et là, il y a du boulot). Des équipes qui n’aient plus peur chaque matin qu’on leur annonce que leur métier est externalisé ou délocalisé, que leur collègue a quitté le Groupe et qu’il ne sera pas remplacé. Arrêtons, ne serait-ce qu’une année, de nous demander de faire toujours plus, avec toujours moins !

 

Une autoformation sur les véhicules électrifiés c’est bien. Des bornes de rechargement des véhicules collaborateurs c’est mieux !

On l’aura compris, l’électrification de notre gamme et de nos ventes est bien le défi collectif des mois et des années à venir.

En cohérence avec le discours, et pour faire de nous des « ambassadeurs » de nos véhicules électrifiés, PSA lançait il y a peu, un cycle d’autoformation sur le sujet. Mais où est la cohérence, quand sur un site comme le nôtre, les deux seules bornes « historiques », de rechargement du parking « silo » ne sont plus utilisables.

Pire que ça. Pour faire face aux besoins supplémentaires de place de stationnement, suite à l’arrivée des équipes de La Garennes, le CEMR lançait l’été dernier la création de plusieurs centaines de places de parking sur le site de l’usine « pointe ouest ». Résultat là encore : toujours aucune borne de rechargement, ni même le moindre signe d’anticipation d’une électrification des allées !

N’en doutons pas, maintenant que le signal est lancé par la Direction générale, cela viendra. Mais quel manque d’anticipation et quel gaspillage… Cela semblera anodin à certain, mais c’est, nous semble-t-il, révélateur d’un manque d’anticipation général, d’un manque de réflexion à long terme. Preuve, s’il en était besoin que devant l’ampleur des chantiers à lancer, il est urgent pour PSA de se poser, d’exposer les enjeux financiers mais aussi humains qui nous attendent, pour obtenir l’adhésion de tous plutôt que la suspicion généralisée.