DAEC 2018. Au risque de l’overdose ?

Communication interne ou externe oblige, vous avez vraisemblablement compris aujourd’hui, que la mise en œuvre, en 2018, d’un dispositif de type « Rupture Collective Conventionnelle » (RCC) n’allait pas changer grand-chose chez PSA.

Les mesures du DAEC 2017 vont être reprises en 2018 (à partir de février), avec quelques ajustements financièrement positifs. Et cela, dans un nouvel enrobage administratif (la RCC), sans conséquences particulières pour les salariés. Vous en trouverez le détail sur le site ici.

Certains, profitant de la complexité sémantique des textes de loi, et de la nouveauté de la RCC, ont cherché à faire le buzz dans les médias, en laissant croire à la mise en œuvre chez PSA d’un plan social qui ne dirait pas son nom.

Il n’en est rien bien sûr, puisqu’au contraire, la rupture conventionnelle collective permet d’encadrer les plans de départs volontaires que nous connaissons depuis des années, mais qui ne bénéficiaient pas jusque-là, d’un statut légal spécifique. Comme souvent, l’état a donc fait rentrer dans la loi, ce qui se pratiquait dans les Grandes Entreprises françaises…

Mais si la catastrophe annoncée par certains n’est pas au rendez-vous, faut-il pour autant se réjouir de cette énième version du DAEC ?

Si vous êtes comme les collaborateurs qui sont venus nous consulter fin 2017, inquiets de la fin du dispositif, votre réponse sera vraisemblablement positive !

Lorsqu’on les interroge, nos anciens collègues, sont en règle générale enchantés de leur « nouvelle vie ». Pour ceux qui restent, ceux proches de la retraite (mais pas encore assez), ou ceux qui n’ont pas réussi à concrétiser leur projet en 2017, c’est donc l’envie de bénéficier des mesures du DAEC qui domine.

Nous sommes, à titre individuel, devenus en quelques sorte, « accro » aux mesures de départ volontaire.

Si nous décidions de mettre fin à ces dispositifs, en ne donnant pas notre accord lors du prochain CCE dédié à ce sujet (le 19 janvier), il est fort probable qu’un grand nombre d’entre vous nous le reprocheraient.

Alors mettons fin au suspense tout de suite, au vu de ce qui lui a été présenté, la CFTC donnera un avis favorable à la mise en place du DAEC 2018 (et donc de la RCC qui l’encadre).

Pour autant, il est également de notre responsabilité syndicale, de nous interroger, et donc de vous interpeler, sur les risques liés à l’enchainement de ces multiples plans de départs volontaires. Tant que les mesures proposées reposeront sur le réel volontariat des candidats, les risques ne sont pas individuels, mais collectifs. 

Une entreprise comme la nôtre peut-elle aller de l’avant avec des salariés qui ne rêvent que de la quitter ?

La réponse est bien évidemment négative. Heureusement, tout le monde n’est pas (encore ?) dans cet état d’esprit, même si beaucoup d’éléments nous y poussent. La situation que nous vivons aujourd’hui est en quelque sorte, le résultat des effets secondaires du remède de cheval que l’on nous injecte depuis 2012. Remède qui, concernant le volet emploi, porte le doux nom de baisse du « Ratio couts salariaux sur chiffre d’affaire », et qui se concrétise depuis par des diminutions drastiques d’emplois PSA.

 

Ces effets secondaires, nous les subissons tous les jours, avec pour n’en citer que quelques-uns :

  • Des collègues qui quittent l’entreprise du jour au lendemain, et en corolaire des pans entiers de nos savoirs qui disparaissent, et des procédures métier de moins en moins maitrisées par ceux qui restent.
  • Des trous partout dans nos organisations.
  • Des managers qui n’ont plus le temps de faire du management, et qui deviennent des opérationnels comme les autres (qui emporteront donc aussi leur savoir avec eux en quittant l’entreprise).
  • Des réorganisations incessantes pour tenter de combler les inévitables dysfonctionnements, mais qui bien souvent ne feront que rajouter des perturbations aux perturbations.
  • Des secteurs entiers qui jusque-là étaient réalisés par des internes et qui sont maintenant sous-traités dans des pays à bas coût de main d’œuvre, avec là encore des compétences et des savoirs maison qui se perdent !

 

Il n’est pas question ici de jeter le bébé avec l’eau du bain. La diminution de nos effectifs a effectivement contribué à sauver le malade que nous étions en 2012.

Mais jusqu’où aller raisonnablement dans la sacro-sainte recherche de notre « efficience ». Jusqu’où diminuer les moyens sans risquer l’accident industriel et humain ?

Lors de la présentation du plan Back In the Race, la Direction précisait alors que : « le ratio total des coûts salariaux / chiffre d’affaires est encore trop élevé (15.1% en 2013), et nous désavantage par rapport aux autres constructeurs (moyenne : 13,5%). Notre objectif : être sous les 12,5% d’ici fin 2016. ».

Mais nous étions à 12% dès 2015, pour atteindre 11,4% en 2016, et vraisemblablement 11% en 2017, ce qui nous placerait en tête de la course. Mais à quel prix et avec quelles conséquences à long terme ?

Tous les salariés que nous sommes ne rêvent pas obligatoirement de quitter l’entreprise. Mais un nombre sans cesse croissant d’entre nous, ont perdu la motivation qui les animait il y a quelques temps encore pour venir travailler chaque matin chez PSA. De plans de départs en plans de départs, ils ont le sentiment de ne plus avoir les moyens de faire correctement leur travail, plus le sentiment d’appartenir à une équipe, à une entreprise qui reconnaisse leur juste valeur, ou même de partager des valeurs et une histoire commune avec leur entreprise. Et comment se sentir solidaire d’une entreprise qui vous répète tous les ans, et tous les jours de l’année, que l’herbe est plus verte ailleurs, que nous devrions rejoindre des prés plus accueillants ?

Alors, oui la CFTC signera vraisemblablement ce nouveau plan de départs volontaires, mais en rappelant qu’il est maintenant grand temps de penser à sevrer le malade, faute de quoi nous prendrions le risque, certes de passer en tête de la course… mais de mourir d’overdose avant de passer la ligne d’arrivée !